les contes énumératifs
Dans les contes énumératifs, les personnages qui s’enchaînent présentent parfois une logique (du plus petit au plus gros pour « La moufle » par exemple) mais on peut les intervertir ou les remplacer ou encore en intercaler sans que le conte ne soit fondamentalement changé.
Différents enchaînements
Il existe différents enchaînements:
–Des contes énumératifs par énumération ( type le plus simple) (A puis B puis C…)
Promenons-nous dans les bois
– Des contes énumératifs par remplacement (A qui laisse sa place à B qui laisse sa place à C…)
Le bonhomme de pain d’épice (différentes éditions)
– Des contes énumératifs par accumulation (les personnages ou les éléments s’accumulent) :
Quel radis dis donc ! P. Gay-Para, Didier
Quelques contes énumératifs
Le gros navet
C’est un conte énumératif par accumulation à la structure assez simple :
L’histoire : Un vieil homme veut arracher un légume qu’il a planté dans son potager et qui s’est énormément développé. Il n’y parvient pas et appelle sa femme. Ils n’ont pas plus de succès ensemble, alors la vieille femme appelle un autre personnage qui en appellera à son tour un autre et ainsi de suite. La situation ne se débloquera qu’à l’arrivée d’une petite souris.
C’est un conte d’origine russe qui existe en de multiples versions. Il peut s’agir d’un rutabaga, d’un navet, d’un radis, d’une carotte ou d’un autre légume mais le principe est toujours le même .
De nombreux albums ont été édités dans la littérature jeunesse. En voici quelques-uns (liste non-exhaustive) :
Dans une des plus anciennes versions transcrites par écrit ( celle de Tolstoï : Le gros navet), l’accumulation des personnages augmente numériquement lorsqu’il s’agit des animaux : un homme, une femme, une vache, deux cochons, trois chats, 4 poules, 5 oies, 6 canaris et….. une petite souris affamée…
Les messages portés par le conte sont les suivants :
– Solidarité, entraide.
– Ne pas hésiter à demander de l’aide, même à ses ennemis
– » On a toujours besoin d’un plus petit que soi ».
La moufle
La moufle est un conte énumératif qui met en scène des animaux qui cherchent un abri. Un premier animal la trouve et d’autres animaux (généralement du plus petit au plus grand) s’y entassent successivement jusqu’à ce qu’un dernier détruise l’abri.
Ce conte est d’origine slave. Souvent intitulé Teremok (en russe : Теремок, La maisonnette), il en a été recensé 25 variantes russes, 10 ukrainiennes et 3 biélorusses, avec des titres variables.
Dans l’édition française, les titres sont nombreux. Voici quelques titres (liste non exhaustive) :
S’il est question le plus souvent d’une moufle, l’objet trouvé par les animaux est parfois un bonnet, un gant, une boîte, une cruche, un parapluie, un turban, une cabane… mais la logique reste toujours la même.
C’est un conte d’accumulation par amplification : les animaux entrent dans la moufle du plus petit au plus grand.
Pour la chute de l’histoire, il y a communément 2 variantes:
– Dans certaines versions (comme les versions d’Afanassiev citées ci-dessus), c’est le plus gros animal qui fait voler en éclats l’abri tant convoité. Dans ce cas, c’est donc la logique qui domine.
– Dans d’autres versions, c’est l’animal le plus petit qui arrive en dernier quand la moufle est pleine et qui la fait craquer. Cette chute renvoie à l’expression : « La goutte d’eau qui fait déborder le vase ».
D’après Suzy Platiel, ethnolinguiste spécialiste du conte, chaque conte a un message.. Le message de La moufle est : Il faut savoir dire non.
On peut aussi voir dans ce conte la notion de solidarité et d’entraide, différents animaux (prédateurs parfois dans la réalité) partageant un abri. Mais on ne pénètre pas dans cet abri sans y être convié. Transgresser cette règle met en péril cet abri collectif.
Avec les élèves, il est intéressant de prendre 2 ou 3 versions d’un conte et de chercher avec eux les différences. Cela leur permet de comprendre la structure de l’histoire et de pouvoir raconter à leur tour leur version, sans réciter un texte par cœur.
Voici une version de la moufle mêlant conte et musique, contée par Hélène Ginestar (accompagnement musique : Chantal Millet ) :
Une autre contée par Catherine Gironde, enseignante et conteuse de l’association « Une sorcière m’a dit » :
Voici un lien vers un article de notre blog concernant les outils pour conter la Moufle:
Outils partagés pour conter la moufle – Une sorcière m’a dit (unesorcieremadit.fr)
Le ciel tombe
Le Ciel Tombe est également un conte énumératif par accumulation.
L’origine de ce conte n’est pas clairement définie. On en trouve des versions dans le bassin méditerranéen, en Angleterre et en Alsace… Encore un bel exemple de conte qui voyage !
Il en existe de nombreuses reprises dans la littérature jeunesse : « Poucet le poussin », « Poussin qui avait peur que le ciel lui tombe sur la tête », « Poussin câlin », « Poule plumette », etc…
Voici quelques albums qui racontent cette histoire :
L’histoire : Une poule (ou un poussin, un dindon…) reçoit quelque chose sur la tête (un gland, une pomme, un citron, une noix de muscade) et croit que le ciel est en train de tomber. Elle (il) décide d’aller chez le roi pour l’en avertir.
En chemin, elle (il) rencontre divers animaux de basse-cour (coq, cane, oie, dindon…) qui décident de l’accompagner, jusqu’à ce que cette petite troupe rencontre le renard qui veut se joindre à elle pour montrer le chemin.
La fin de l’histoire varie selon les contes.
En voici une version contée par Hélène Ginestar accompagnée par Chantal Millet au dulcimer :
Chat ventru ou femme vorace : histoire de dévoration
Ces contes, dont le personnage principal est vorace, sont des contes énumératifs par accumulation qui ont la particularité d’être « avec rebond » : le personnage avale des objets ou des personnages (généralement de plus en plus gros) jusqu’à une rupture après laquelle tous les personnages ressortent (en ordre inverse de leur entrée dans le ventre).
Ces contes sont originaires d’Europe du Nord.
On peut citer :
Tata Gugube, la femme vorace (conte suédois):
Tata Gugube fait un copieux repas (7 pots de lait + 7 plats de bouillie) mais elle a encore faim; Elle avale alors successivement : un goret + une truie + une chèvre + une vache + un cheval + un renard.
Elle n’arrive pas à attraper le dernier (un écureuil ) et tombe de l’arbre sur lequel elle était montée pour le poursuivre. Son ventre éclate et tous les personnages ressortent en ordre inverse : renard <cheval<vache<chèvre<truie<goret<7 plats de bouillie<7 pots de lait
Références bibliographiques :
- La bonne femme vorace (dans Contes populaires suédois, choisis et traduits par Léon Pineau – Paris, Delagrave, 1934)
- Comment finit le dernier repas de Tata Gugube (dans « Miroir des contes » de Lily Boulay, Armand Colin Bourrelier, 1982)
- Un petit Creux (de Françoise Diep et Barbara Martinez, Lirabelle)
Le chat ventru : un conte danois conté par Michèle Simonsen
Le chat et le perroquet : un conte d’Inde collecté par Sara Con Bryant
Kouratcho le terrible : un conte de la République tchèque raconté par Judy Sierra dans « Les vingt contes les plus drôles du monde » (Gallimard jeunesse)
Le bonhomme de pain d’épices
La première apparition du conte du Petit Bonhomme de pain d’épices eu lieu en mai 1875 dans un magazine américain.
L’auteur introduit le conte ainsi : « Je vais maintenant te raconter une histoire que l’arrière-grand-mère de quelqu’un a raconté à une petite fille il y a tant d’années… », laissant ainsi entendre que cette histoire appartient à une tradition orale lointaine.
Une multitude de versions de cette histoire ont été racontées par la suite mais on retrouve toujours la même structure :
Un bonhomme de pain d’épices s’enfuit du four. La femme qui l’a préparé se lance à sa poursuite, son mari derrière elle. Le bonhomme rencontre différents personnages qui veulent également l’attraper et s’accumulent derrière lui.
Le conte se termine lorsqu’un renard attrape le petit bonhomme et le mange.
Généralement, il existe une ritournelle criée par le bonhomme de pain d’épices à tous ceux qui veulent l’attraper. Dans la version de 1875, c’était :
» De chez une petite vieille je me suis enfui,
d’un petit vieux aussi,
et je peux m’enfuir loin de vous, je vous dis ! »
Quelques albums dans la littérature jeunesse (liste non exhaustive) :
Voici différentes vidéos de cette histoire :
Contée par Hélène Ginestar avec des gestes pour marquer l’aspect répétitif :
Contée par Catherine Gironde avec son tapis-conté:
La grenouille à grande bouche
C’est un conte énumératif par remplacement. Contrairement aux contes énumératifs précédents, les personnages ne s’accumulent pas mais un personnage remplace un autre.
Dans ce conte, une grenouille en a assez de ce qu’elle mange ; elle part alors à la découverte de ce que mangent d’autres animaux afin de diversifier son alimentation. A chaque fois qu’elle rencontre un animal, elle lui demande ce qu’il mange mais la réponse ne lui plaît pas. Alors, elle quitte l’animal en question et va en trouver un autre…. jusqu’à ce qu’elle arrive devant un crocodile.
Voici ce conte raconté par Hélène Ginestar :
Ce conte aide à prendre conscience que ce n’est pas toujours mieux ailleurs.
Il semblerait que cette histoire soit inspirée d’un conte africain (c’est ce qu’affirme les éditions Accès). En ce qui nous concerne, on se souvient surtout de cette histoire qui se racontait comme une blague il y a de nombreuses années…
Depuis, l’édition jeunesse en a publié un certain nombre de versions…
La pot qui tiptopait :
Ce conte, très populaire au Danemark et en Suède, a pour thème un pot magique qui prend aux riches pour donner aux pauvres.
Il se retrouve sous plusieurs titres : la marmite qui trotte, le pot qui tiptopait, la cocotte qui tap-tip-tope…
Le voici raconté par Laurence Fustec et Catherine Tessier:
Qui sera le plus fort ?
Un conte japonais conté par Hélène Ginestar et Chantal Millet
La coque de noix
Coline Promeyrat a adapté un conte répandu dans le bassin méditerranéen (et notamment en Algérie, Tunisie et Maroc) sous le titre « Le bateau de M. Zouglouglou ».
Le thème est le suivant. Quelqu’un fabrique un bateau avec ce qu’il trouve (une coque de noix, une croute de pain…) et vogue sur l’eau. Des animaux s’accumulent sur l’embarcation jusqu’à ce qu’un tout petit animal (une puce ou un insecte) fasse chavirer le bateau.
Un thème de conte que rappelle l’histoire de la moufle.
Voici l’histoire racontée par Marianne Chassat à l’aide de son tapis conté :