les randonnées

Généralement réservés aux petits (contés par les nourrices ou les grands-mères notamment), les contes de randonnées étaient l’occasion d’une première prise de parole par les adolescents lors des veillées.

Ce sont des contes à structures répétitives, présentant une chaîne de personnages, d’éléments ou d’événements qui se répètent jusqu’au dénouement final.

D’un point de vue pédagogique, ils permettent un travail de mémorisation (structure, chaîne, phrases répétitives) ; souvent rythmés, ils sont propices à un travail sur l’élocution et la maîtrise du rythme ; enfin, ils permettent de communiquer avec le public qui est invité à intervenir dans la répétition de la chaîne de personnages.

La structure des contes de randonnées

Le contes de randonnée tiennent leur nom de:

RANG DONNÉ

Ainsi, les randonnées présentent une série d’actions qui s’enchaînent dans un ordre immuable :  une action en entraîne une autre, qui en entraîne une troisième etc..

La situation initiale est bloquée et on va chercher de l’aide pour la débloquer. Cette aide ne sera accordée que sous certaines conditions.

Il existe d’autres formes de randonnées :

– avec rebond :  on repart chercher de l’aide pour éliminer ce second blocage. Et ainsi de suite jusqu’à ce que le dernier recours débloque la situation ou qu’il accepte d’aider, ce qui entraînera l’aide de l’avant-dernier recours, puis du précédent jusqu’à ce que le premier qui a refusé cède enfin.

– sans rebond : le dernier débloque la situation

– circulaire : on revient au point de départ

( voir les exemples ci-dessous)

Dans toutes ces formes de randonnées, on ne peut pas intervertir l’ordre des actions.

Les randonnées avec rebond

Ces randonnées présentent une chaîne de personnages, d’éléments ou d’événements qui se répètent jusqu’à ce qu’un des personnages mette fin à l’enchaînement. Alors, à la fin de l’énumération, les actions se « rembobinent » pour débloquer la situation initiale.

Un animal têtu, point de départ de nombreuses randonnées avec rebond

De nombreuses randonnées ont pour point de départ un personnage récalcitrant.

En effet, ce thème se retrouve dans de nombreux contes des provinces de France ou d’Europe :

  • en Lorraine, le loup ne veut pas sortir du bois ;
  • en Angleterre, le cochon ne veut pas rentrer à la maison ;
  • en Hollande, le cochon ne veut pas traverser la rivière sur le pont ;
  • en Russie, la chèvre ne ramène pas les noix du bois ;
  • En Poitou, la chèvre ne veut pas traverser le pont ou Bricou ne veut pas garder les choux ;
  • Dans différentes régions de France, la chèvre ne veut pas arrêter de manger les choux.

Le principe est toujours le même : un animal refuse quelque chose. On demande à un autre personnage d’interagir pour le pousser à obéir, ce qu’il refuse… On fait alors appel à un autre personnage pour qu’il interagisse sur le précédent, mais il refuse également…  et ainsi de suite jusqu’à ce qu’un dernier personnage (généralement un personnage puissant : juge, bourreau, diable… ) accepte ce qu’on lui demande. La situation s’inverse alors  : chaque personnage accepte ce qu’il avait alors refusé, par peur de la sanction.

Une chèvre têtue

Il peut s’agir d’une chèvre qui ne veut pas traverser un pont, ou qui ne veut pas rentrer à la maison.  La chaîne des événements peut varier (surtout à la fin)  mais certains éléments sont récurrents :

Au départ, il y a une chèvre qui ne veut pas obéir –> on va chercher le chien pour la mordre mais il refuse –> on va chercher le bâton pour taper le chien mais il refuse –> on va chercher le feu pour brûler le bâton mais il refuse  –> on va chercher le feu pour brûler le bâton mais il refuse –> on va chercher l’eau pour éteindre le feu mais elle refuse –> on va chercher la vache pour boire toute l’eau mais elle refuse, etc…

A la fin, selon les histoires, peuvent intervenir le boucher, la corde, le diable…. mais ces randonnées finissent toujours par un « rebond » c’est à dire que le dernier personnage finit par accéder à la demande entraînant ainsi un déblocage de la situation en cascade…

Une des versions les plus courantes de cette histoires se présente sous forme de chanson.

Chanson: Ah ! tu sortiras, biquette, biquette !

Ah ! Tu sortiras, Biquette, Biquette,
Ah ! Tu sortiras de ces choux-là
Ah ! Tu sortiras, Biquette, Biquette,
Ah ! Tu sortiras de ces choux-là

On envoie chercher le chien, (bis)
Afin de mordre Biquette. (bis)
Le chien ne veut pas mordre Biquette.
Biquette ne veut pas sortir des choux.

Ah ! Tu sortiras, Biquette, Biquette,
Ah ! Tu sortiras de ces choux-là
Ah ! Tu sortiras, Biquette, Biquette,
Ah ! Tu sortiras de ces choux-là

Et on enchaîne avec le loup pour manger le chien, le bâton pour frapper le loup, le feu pour brûler le bâton, l’eau pour éteindre le feu, le veau pour boire toute l’eau, le boucher pour tuer le veau et enfin le diable pour emporter le boucher. Le diable veut bien, lui. Alors, tous les autres à tour de rôle changent d’avis :

Le diable veut bien emporter l’boucher.
Le boucher veut bien tuer le veau.
Le veau veut bien boir’ toute  l’eau.
L’eau veut bien éteindre le feu.
Le feu veut bien brûler le bâton.
Le bâton veut bien frapper le loup.
Le loup veut bien manger le chien.
Le chien veut bien mordre Biquette.
Et…. Biquette veut bien sortir des choux !

Le cochon têtu

Le petit cochon têtu est une randonnée parfois intitulée Le cochon de lait ou La vieille femme et son cochon.

On retrouve l’origine de ce conte dans différents pays ou régions : très répandu en Angleterre, en Hollande, en Alsace…..

Il existe différents albums présentant différentes versions :

L’album le plus connu est sans doute celui de Jean-Louis Le Craver aux Editions Seuil Jeunesse : « Le petit cochon têtu« .

Il s’inspire d’un conte alsacien, mais c’est surtout dans les pays anglo-saxons que ce conte est très présent.

Sara Con Bryan, collecteuse de contes américains ( 1873-1956) en a écrit une version dans son livre « How to Tell Stories To Children, and Some Stories to Tell ». 

On peut télécharger ce texte sur le site litterature-jeunesse-libre.fr:

Cliquer ici pour télécharger le texte

D’autres randonnées avec rebond

Voici quelques références d’autres randonnées traditionnelles avec rebond :

Vreroche, un conte algérien dont le point de départ est un enfant qui ne veut plus manger depuis que le loup a dévoré sa biquette préférée.
On peut trouver le texte et l’enregistrement en français (dit par Nora Aceval) et en arabe (dit par Mustapha Chaïb) sur l’excellent site conte-moi.net:
Sur le thème du coq (ou de la poulette) qui s’étrangle après avoir avalé quelque chose :
  • Le coq glouton de Gérard Franquin et Robert Giraud, Flammarion Jeunesse Pere Castor
  • Le coq mange-noix par Roberto Mezquita, trad. de l’espagnol par Maud Huntingdon, Ill Benardo Carvalho-  OQO Editions
  • Petit cocheri qui s’étrangle dans  Contes en ritournelle d’Edith Montelle – Société suisse de Perfectionnement pédagogique, 1998

Pourquoi le moustique bourdonne à nos oreilles:

Un conte africain qui est à la fois une randonnée et un conte étiologique.  Le voici conté par les deux sorcières : Hélène Ginestar et Chantal Millet :

La logique de comparaison : des randonnées circulaires

Ce sont des randonnées  sans rebond mais plutôt « circulaires » : les actions s’enchainent jusqu’à un retour au point de départ.

Dans cette thématique   » de plus en plus puissant « , chaque personnage rencontré connait quelqu’un de plus puissant que lui, jusqu’à un retour au personnage de départ.

Dans cette catégorie, les deux histoires les plus connues sont :

  • Le mariage de la petite souris
  • Le tailleur de pierre

Le mariage de la souris

Le thème est le suivant : Qui sera assez puissant pour épouser la petite souris ? Le père de la souris  lui cherche un mari plus puissant que le souriceau… Chaque personnage interpellé trouve quelqu’un de plus puissant que lui : le soleil est moins puissant que le nuage, qui est moins puissant que le vent, qui est moins puissant que la montagne, qui est moins puissant que le souriceau…

On trouve quelques versions de ce conte qui serait d’origine coréenne.

   

Le tailleur de pierre

Le tailleur de pierre (ou tailleur de montagne) est un conte japonais.

On peut trouver le texte sur le « site du Japon »:

Le tailleur de pierre, conte du Japon. – le site du Japon

A suivre…

Les chaines de conséquence

Ces contes de randonnée ont pour point de départ un accident qui provoque la blessure ou la mort d’un animal : un pou qui se brûle, le rat qui se noie…. Cela entraine une série de dysfonctionnements de la part des personnages ou objets qui apprennent la nouvelle.

Ce type de randonnée est rythmée, souvent ponctuée par des onomatopées avec un effet d’accumulation

Le pou et la puce

Extrait:

« Pourquoi pleures-tu ? demande la fenêtre.

– Comment, tu ne sais pas ? répond la puce :  Pou s’est assis sur la cuisinière, il s’est brûlé le derrière, alors moi je pleure.

– Et bien moi, dit la fenêtre, je vais taper : Clac clac ! »

Le plus connu de ces contes est sans doute l’histoire du pou et de la puce.

Cliquer sur l’article ci-dessous pour en savoir plus :

Le pou et la puce – Une sorcière m’a dit (unesorcieremadit.fr)

D’autres récits sont basés sur le même principe.

Le rat et la rate

Voir ce conte de Gascogne collecté en 1887:

le rat et la rate

Les éditions Flies France ont édité ce conte à destination des jeunes enfants dans leur collection  intitulée « Le Jardin des contes » :

La chaine de dévoration

Une randonnée basée sur la chaîne  alimentaire.

Sylvie Ronteix a ainsi adapté de conte africain « La coccinelle de Saïdou  » :