Cette fable est la dixième du Livre VI des Fables de La Fontaine située dans le premier recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en mars 1668.
En voici le texte original (extrait du livre « Fables de la Fontaine » paru en 1938 aux Editions des Enfants de France) :
Pour écouter cette fable de La Fontaine, voici 2 versions audio :
- Sur le site « Il était une histoire » conçu et réalisé par Rue des Ecoles, en partenariat avec MAIF (choisir « Ecouter » dans le menu déroulant en bas à gauche de l’écran ») :
Ecouter la fable de La Fontaine sur le site « Il était une histoire »
- Lecture par Michael Mansoursur le site La minute de poésie :
Ecouter la lecture sur le site « La minute de Poésie »
- Un enregistrement plus ancien : celui de Fernandel, extrait de l’album « Les Fables De La Fontaine Par Louis De Funès, Fernandel Et Gérard Philipe » :
Ecouter la fable dite par Fernandel
- Des années plus tard, c’est le petit-fils de Fernandel, Vincent Fernandel, qui a enregistré quelques contes et fables et notamment le lièvre et la tortue sur la chaine YouTube de Fleurus Edition.
Ecouter la fable par Franck Fernandel
On retrouve cette version dans le livre-CD « Les Fables de La Fontaine, racontées par Vincent Fernandel »
Une lecture par Lambert Wilson accompagné par l’Orchestre de la Suisse Romande:
Cliquer sur ce lien pour écouter Lambert Wilson et l’OSR
Lexique
Si la définition du lexique n’est pas l’entrée première pour rendre la fable compréhensible, certains termes gagnent à être expliqués dans un second temps :
Quatre grains d’éllébore :
Le grain est une mesure de poids valant 1/24 de denier, soit 0,053g.
L’ellébore était utilisé autrefois pour soigner la folie, selon l’expression « Purger avec deux grains d’ellébore ».
Si 2 grains suffisaient, le lièvre qui en « prescrit » 4, montre à quel point il pense que le pari de la tortue est fou.
Aux calendes : aux calendes grecques…. On dit proverbialement : renvoyer un homme aux calendes grecques pour dire le remettre à un temps qui ne viendra point (dictionnaire de Furetière).
Aller son train de sénateur : l’expression faire référence aux sénateurs romains, dont la majesté est proverbiale. L’expression « aller son train de sénateur » n’a pas perdu une ride aujourd’hui.
Fable contée
Les deux sorcières de l’association, Hélène Ginestar et Chantal Millet nous content « Le lièvre et la tortue »:
L’origine de la fable
Plusieurs auteurs ont proposé une version de cette histoire avant La Fontaine (avec parfois des protagonistes différents) :
Ésope (VIe siècle avant J.-C.) : La tortue et le lièvre. Voici une traduction par Émile Chambry en 1927:
Retrouver le texte en ligne sur le site archive.org
Gilles Corrozet (1510-1568) publie en 1542 un ouvrage intitulé » Les Fables du très-ancien Ésope » dans lequel il propose cette traduction intitulée « Plus que diligence que par force »:
Gilles Corrozet (1510-1568) :
Des fourmis et de la cigale ou grillon
Une grand’troupe de fourmis
Ensemble en un creux s’étaient mis,
Et avaient durant tout l’été
Amassé grande quantité
De blé, qu’ils avaient pu trouver
Pour se nourrir durant l’hiver ;
Lequel venu, une cigale
De qui la cure principale
Est de chanter l’été durant,
Laquelle était faim endurant,
Vint aux fourmis, et leur pria
Lui donner si peu qu’il y a
De leur blé. Ce qu’ils refusèrent,
Et par rigueur lui demandèrent
Qu’elle avait fait l’été passé,
Sans avoir son pain amassé.
Dit la cigale : » Je chantais
Et par les blés je m’ébattais. –
Lors, dirent les fourmis ainsi,
Il faut que l’endures aussi
Puisqu’ainsi est que tu as tant
Chanté l’été en t’ébattant,
Il te faut en hiver danser
Ainsi te faut récompenser. »
Qui ne pourvoit en temps et heure
En grand’nécessité demeure
La morale de cette histoire
La moralité se situe dès le début de la fable, « Rien ne sert de courir ; il faut partir à point. »
Il est inutile de se précipiter quand il est trop tard, mieux vaut commencer à l’heure, s’appliquer et prendre son temps. La patience, la persévérance et l’effort paient plus que l’insouciance et la présomption.
Une trop grande confiance en soi peut se révéler néfaste. Il ne faut jamais sous-estimer son adversaire et de surcroît, se montrer trop prétentieux.
La morale énoncée par Ésope est très explicite : « Le travail l’emporte sur les dons naturels.. ».
La version de Corrozet (qui place aussi la morale en exergue), met également en valeur le travail et la persévérance :
« Par un long labeur assez continué
On trouve fin de ce qui est entrepris
Persévérance obtient toujours son prix
Qui n’est jamais de l’honneur dénué ».
Au delà d’Ésope et Corrozet, La Fontaine a sans doute aussi été inspiré par François Rabelais qui, dès son Gargantua, énonçait : « Ce n’est tout l’avantage de courir bien vite, mais bien de partir de bonne heure ».
Et la science dans tout ça ?
Une vidéo a fait le buzz sur la toile en 2016… Elle présentait une course entre un lapin et une tortue, organisée en Thaïlande, lors d’un salon sur le thème des animaux de compagnie baptisé Pet Variety.
« Comment expliquer ce résultat ? Tout d’abord en raison des différences de sensibilité des sens de ces animaux. Le lapin possède une ouïe très fine mais également un odorat très développé. Le bruit et les différentes odeurs provoqués par la foule ont sans doute distrait le petit animal qui n’a pas cessé de s’arrêter pour « analyser » ceux-ci. La tortue, quant à elle, n’utilise que peu son ouïe et n’est donc pas perturbée par les sons extérieurs. Contrairement aux idées reçues, les tortues sont actives en journée et sont curieuses : elles parcourent souvent leur environnement, d’autant plus lorsqu’elles cherchent à se nourrir, ce qui explique sa franche avancée lors de la course. Il semblerait qu’elle se soit mise à marcher d’elle-même ou bien pour de la nourriture; en cas de stress, elle serait restée dans sa carapace. » (Sciences et Avenir)
Cliquer ici pour accéder à l’article de Sciences et Avenir et à la vidéo
Les versions musicales
Les illustrations
L’association Calliope, qui défend les arts de la parole, a regroupé près de 50 illustrations de cette fable.
Bravo et merci à eux pour ce travail !
On trouve aussi sur le site de l’Institut de France des illustrations de cette fable venant du fonds Erhard
De manière moins exhaustive, voici la présentation de quelques illustrations anciennes:
Gustave Doré (vers 1867): Dessin préparatoire pour l’illustration des fables de La Fontaine : Plume, encre, lavis, gouache blanche, sur bois
Louis-Maurice Boutet de Monvel, dans Fables choisies pour les enfants et illustrées, 1888, Plon-Nourrit & Cie, imprimeurs-éditeurs, Paris
Arthur Rackham
Peintre aquarelliste et illustrateur anglais (1867-1939)
dans Fables d’Ésope: « La tortue et le lièvre » (1913)
Raymond de Nézière (1865 – 1953)
dans « Fables de La Fontaine »,
édité par Alfred Mame et Fils, Tours, 1923
Illustration en silhouettes d’Henri Avelot (1932) : Dessin extrait du livre » Dix fables d’animaux, illustrations en silhouettes humoristiques aux dépens des humains » (Paris, édition Henri Laurens, 1932).
Mais vous trouverez dans les éditions contemporaines le talent de nombreux autres illustrateurs…
Quand Walt Disney s’empare de la fable…
Le Lièvre et la Tortue est un court métrage d‘animation américain de la série des Silly Symphonies réalisé par Wilfred Jackson, produit par Walt Disney, pour United Artists, sorti le 5 janvier 1935.
Voir l’article de Wikipedia concernant le film de Walt Disney
Tex Avery a également créé une version de cette fable en film d’animation qui est sortie en 1941 sous le titre La tortue bat le lièvre (titre original : Tortoise Beats Hare)
Voir l’article de Wikipedia concernant le film de Tex Avery
Les récupérations publicitaires
Le thème de la vitesse, de la lenteur et la morale « Rien ne sert de courir, il faut partir à point », a inspiré de nombreux publicitaires. Utiliser une histoire connue est un procédé qui, on le sait, est toujours bien accueilli par le consommateur. En effet, celui-ci s’identifie plus facilement aux personnages dont il connait déjà l’histoire.
En premier lieu, c’est sur des buvards que l’on trouve la fable vers les années 1955 :
Une mention particulière à Germalyne qui a modifié la fable et fait gagner le lièvre grâce à sa consommation de germes de blé !!
En 1999, c’est Badoit qui sort cette publicité avec les voix de Jean Rochefort et Daniel Prévost.
En 2005, c’est Puma qui utilise la fable :
Voir la vidéo sur le site culture pub
Vers 2005 Mercedes diffuse celle-ci lors d’une finale du Superbowl . Le Lièvre part à toute allure pendant que la Tortue, elle, prend tout son temps. Tout prévoit une victoire facile du Lièvre, quand tout à coup, la Tortue aperçoit un concessionnaire Mercedes-Benz et décide de monter dans la Mercedes-AMG GT S et cela va lui permettre de remporter la course aisément.
Source Hyzy : https://hyzy.fr/lievre-et-la-tortue-mercedes/?utm_source=cpp
Tout récemment, en 2020, c’est IKEA UK et son agence Mother qui ont utilisé la fable pour donner le secret pour réussir ses objectifs : dans cette histoire, c’est de bien dormir !
On découvre dans la publicité, le lapin dans un Londres de notre époque. La caméra le voit discrètement déambuler dans les rues avant de rejoindre ses amis pour boire quelques coups. La soirée est bien arrosée et il finit par rentrer chez lui, où il passe encore du temps à regarder un film, jouer de la guitare… avant de s’effondrer sur son canapé. La tortue, quant à elle, a privilégié le sommeil.
La publicité est réalisée par Sam Pilling (Pulse) et est accompagnée du classique hip-hop britannique Witness (1 Hope) de Roots Manuva pour la bande son.
Un jeu
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